Peut-être avez-vous vu les médias qui rapportaient que le 30 mars dernier, Amazon avait congédié un employé qui avait incité ses collègues à abandonner leur travail ce jour-là en raison de craintes liées au coronavirus.
Selon Amazon, on aurait ordonné à ce travailleur, Chris Smalls, de demeurer en quarantaine chez lui pendant 14 jours, avec salaire, puisqu’il avait été en contact avec un collègue contaminé. Malgré cette directive, l’employé s’était présenté au travail, mettant ainsi ses collègues en danger. Invoquant de nombreux enjeux sanitaires, Amazon a sur le champ mis fin à son emploi. L’employeur a par ailleurs affirmé qu’il prenait des mesures exceptionnelles pour assurer la salubrité.
L’employé croit plutôt qu’il a été visé par l’employeur pour avoir pris position en faveur des employés et s’être fait leur porte-parole. Les « grévistes » avaient demandé une fermeture temporaire des installations de façon à permettre à Amazon de procéder à un nettoyage en profondeur, et avaient exigé de l’équipement de protection de même qu’une prime en raison du danger de contagion.
Les sympathisants à la cause auraient vu ce congédiement comme une tactique d’intimidation et de sanction envers le mouvement de refus de travail.
L’affaire a eu des suites. La procureure générale de l’État de New York a émis un communiqué qualifiant ce congédiement de scandaleux et appelant le National Labor Relations Board à faire enquête. De son côté, le maire de New York, Bill de Blasio, a aussi demandé au commissaire aux droits de la personne de la ville de faire enquête.
Il est intéressant de regarder cette affaire dans une perspective québécoise, dans laquelle s’opposent l’obligation de l’employeur d’assurer la sécurité des lieux de travail, cruciale dans les circonstances que nous connaissons, et les libertés d’association et d’expression, droits constitutionnels reconnus aux travailleurs. Si les circonstances sont telles que l’employeur doit prendre rapidement des mesures exceptionnelles afin de protéger ses travailleurs et de contrer la progression de la contagion, les employés ont alors également le droit de se mobiliser et d’exprimer leurs soucis à l’égard de la salubrité des lieux de travail.
Au Québec, la Loi sur la santé et la sécurité du travail prévoit en effet qu’un employeur doit prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger la santé et assurer la sécurité et l’intégrité physique de ses travailleurs. Ainsi, en raison de la pandémie COVID-19, il se doit d’apporter des changements à l’organisation du travail afin de rencontrer cette obligation légale
En outre, un travailleur a le droit de refuser d’exécuter son travail s’il a des motifs raisonnables de croire que l’exécution de ce travail l’expose à un danger pour sa santé, sa sécurité ou son intégrité physique ou peut avoir pour effet d’exposer une autre personne à un semblable danger. Ce droit de refus fera l’objet ultimement d’une décision d’un inspecteur de la CNESST en cas d’impasse entre l’employeur et l’employé. Un travailleur peut également déposer une plainte ou signaler une situation dangereuse à la CNESST. Ceci rend d’autant plus importante l’obligation pour un employeur de s’assurer que toutes les mesures sont prises en matière de santé et de sécurité du travail au sein de l’entreprise afin d’éviter de s’exposer à ce genre de conséquence.
L’équipe de droit du travail et de l’emploi de RSS est en mesure de vous aider à déterminer si vous suivez les recommandations émises par le gouvernement en la matière et de vous conseiller en cas de situation sensible en matière de santé et sécurité et de relations de travail.