Dans un jugement rendu le 10 février dernier, Loue Froid inc. c. Ville de Longueuil, 2020 QCCS 447, la Cour supérieure rejette la demande de la Ville de Longueuil [« la Ville »] afin que Compagnie d’assurance AIG du Canada [« l’assureur »] assume sa défense dans le cadre d’une poursuite par la demanderesse Loue Froid Inc. [« Loue Froid »].
À la suite d’un appel d’offres lancé par la Ville pour la location de refroidisseurs à son centre d’épuration des eaux de l’Île Charron, le Centre d’épuration Rive-Sud [« CERS »], la soumission de Loue Froid est retenue. Une entente de location intervient, pour la période du 15 juin 2018 au 26 novembre 2018. Le 26 novembre 2018, après avoir été appelée pour démobiliser ses équipements, Loue Froid se rend sur le site et constate que ses unités sont endommagées. Elle allègue dans son action que les dommages résultent du gel des composantes des refroidisseurs qui ont été mis en arrêt par la Ville avant qu’elle soit contactée pour leur démobilisation.
L’exploitation du CERS est sous la responsabilité de la défenderesse en garantie AquaCERS, Société de gestion du CERS inc. [« AquaCERS »]. En vertu de son contrat d’exploitation avec la Ville, AquaCERS avait l’obligation de souscrire une assurance responsabilité civile générale désignant la Ville comme assurée additionnelle. L’avenant 14 de la police ajoute la Ville à titre d’assurée additionnelle, sous réserve de certaines restrictions.
L’assureur refuse d’assumer la défense de la Ville puisqu’il considère que les biens endommagés sont spécifiquement visés par une exclusion de sa police pour les dommages aux biens dont la Ville est locataire :
« Dommages matériels » causés à :
des biens dont vous êtes propriétaire, locataire ou occupant, y compris tous frais ou dépenses engagées par vous ou par toute autre personne physique ou morale ou toute entité, pour la réparation, le remplacement, la mise en valeur, la restauration ou l’entretien desdits biens pour quelque raison que ce soit, y compris la prévention de blessures à une personne ou de dommages aux biens de tierces parties; [soulignements de la Cour] |
L’assureur ajoute un second motif à son refus de couvrir, soit que l’un des reproches adressés à la Ville dans l’action n’est pas visé par la garantie.
La Cour, après avoir analysé les allégations et les pièces au soutien de la demande, dont des factures de location, retient que le recours entrepris par Loue Froid contre la Ville se fonde sur la responsabilité de cette dernière à titre de locataire des refroidisseurs. Elle conclut donc que l’exclusion pour dommages causés aux biens dont l’assurée est locataire trouve application.
La Ville rétorque que la portée de l’exclusion dénature l’objet de la protection offerte en annulant à toutes fins pratiques tous ses effets, demandant ainsi qu’elle soit écartée. Cet argument ne résiste pas à l’analyse de la Cour. La police couvre la responsabilité de la Ville pour les dommages corporels et matériels découlant de l’exploitation du CERS par AquaCERS. L’exclusion n’a donc pas pour effet de stériliser la garantie offerte par la police et l’assureur est justifié de refuser de prendre fait et cause pour la Ville en l’instance.
Quant au second motif soulevé par l’assureur, la Cour est d’avis qu’il n’a pour but que de déterminer la portée de l’obligation de défendre de l’assureur et que cette analyse n’est pas utile dans le cas présent compte tenu de sa conclusion concernant l’application de l’exclusion.